Par Stéphanie ESPOSITO publié le samedi 20 juillet 2019
“A gauche, une étagère en bois ; au milieu, un fauteuil rouge; à droite, un pupitre.” Mots chuchotés à l’oreille, scénographie dessinée un doigt glissant sur la paume de la main… Silence, le spectacle commence.
Malvina est une spectatrice particulière: elle a des yeux pour deux. Celui à qui elle offre son regard, c’est Bruno, déficient visuel. Depuis quinze ans qu’il vient au festival, c’est la première fois qu’il profite des services des “Souffleurs d’Images”, désormais partenaires officiels du Off.
“En général, ce sont mes amis qui m’expliquent ce qu’il se passe sur le plateau, mais les souffleurs sont des gens formés, ils ont plus d’expériences.” Les qualités requises ? ” Il faut être attentif au “soufflé” et savoir faire de la synthèse”, indique Malvina. “On va pas voir les spectacle pour nous”.
27 souffleurs d’images, étudiants en art, artistes ou spectateurs aguerris, collaborent cette année avec le off. “Il y a aussi des souffleurs de danse”, indique Emilie Bougouin, directrice du Centre recherche théâtre handicap (CRTH, Paris). “Le souffleur doit avoir connaissance de la discipline qu’il va souffler.” Il doit pouvoir s’adapter, aussi, à la personne malvoyante ou aveugle, qui n’a pas à chaque fois les mêmes attentes : “Certains veulent avoir tous les détails, reprend Bruno. Moi, c’est la description du plateau et des costumes, de préférence avant le début de la pièce.” Quand le décor change, le souffleur doit alors s’intercaler, trouver sa place : la plus discrète possible mais non moins efficace.
Faire appel à un souffleur permet aussi à Bruno, amateur connaisseur de théâtre, de découvrir des créations plus complexes, avec des composantes visuelles plus importantes : “Ca élargit le choix des spectacles où je peux aller.”résume-t-il, après en avoir vu déjà une petite trentaine depuis son arrivée à Avignon, dont trois ou quatre avec des souffleurs.
Pour cette édition, ainsi particulière du festival Off, Catherine Mangin, responsable du service Souffleurs d’Images au CRTH, est en quelque sorte la “bookeuse” des souffleurs, avec une réactivité que le monde culturel parisien doit envier : en deux jours, votre quelques heures, la jeune femme est en capacité de répondre à la demande d’une personne malvoyante, contre quinze jours dans la capitale.
A noter que c’est la compagnie qui invite alors le souffleur: une centaine de spectacles sont partenaires de ce service. Un bon argument pour souffler l’idée au In pour 2020…